Julio Cortàzar, Gallimard, 1970.
https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/L-Imaginaire/Tous-les-feux-le-feu#
Lectures en tout genre
Julio Cortàzar, Gallimard, 1970.
https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/L-Imaginaire/Tous-les-feux-le-feu#
Olivia Rosenthal, Verticales, 2007.
http://www.editions-verticales.com/fiche_ouvrage.php?id=266
Tennessee Williams, 1958.
Des passages entiers de dialogue similaire repris dans le film (l’entretien initial entre Violet Venable et le docteur Cukrowicz, le monologue final de Catherine Holly), mais aussi des différences majeures et significatives :
Le tout donne alors une impression plus univoque, incite moins à l’appérciation ambigue des différents personnages. Le film, par les ressources cinématographiques de la diversité des scèmes, me semble plus subtil et complexe, moins à charge de Violet Venable.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Soudain_l%27%C3%A9t%C3%A9_dernier_(pi%C3%A8ce_de_th%C3%A9%C3%A2tre)
Grahame Lock, PUF, 1992
https://www.puf.com/wittgenstein-philosophie-logique-therapeutique
https://www.cairn.info/wittgenstein-philosophie-logique-therapeutique–9782130443087.htm
L’idée fondamentale du Tractatus
Ce premier livre est bien une fin : tout l’effort consiste à solder l’héritage de Frege et de Russell, donc en poursuivant, même pour y mettre un terme, leur conversation à propos de la logique, leur tentative de la fonder de façon définitive. Il faut bien commencer par discuter des thèses en cours, prendre la conversation de travail là où elle en est, même dans l’idée d’en dévier le cours. On élabore toujours à partir du patrimoine, y compris dans l’approche consistant à poser des définitions pour tenter d’imposer sa conception de ce qui est clair et de ce qui ne l’est pas.
L’argument essentiel du Tractatus selon Lock : « les constantes logiques ne sont des représentants de rien. » (4.0132) ce que j’essaie de reformuler : il n’y a pas de référent extérieur au langage pour des formulations logiques, rien dans l’ordre d’une réalité à mettre derrière des formulations comme « c’est évident » ou « c’est intuitif ». La logique est entièrement interne au langage (aux signes utilisés par les humains). Même chose pour les affirmations mathématiques, axiomes ou théorèmes.
Que faire (que fais-je ?) des questions et considérations de techniques philosophiques, dont je ne comprends pas grand-chose, sur le moment, et encore moins en essayant d’en parler ? Serait-il possible, mais alors pourquoi personne ne le fait, de résumer la démarche de Wittgenstein de façon succincte, ramassée, comme on est capable de synthétiser une démonstration mathématique ou une thèse scientifique ? Je m’y essaie : Wittgenstein s’en prend à toute substantivation de termes comme « je », la conscience, la sensation, à toute assimilation d’un mot à une chose. Cette formule en soi est significative : je ne peux qu’écrire « pomme », jamais croquer une pomme telle que je l’écris. Même « la preuve du pudding, c’est qu’on le mange » a un rapport distancié au réel : quel pudding ? Qui le mange ? Qu’est-ce que manger ? On ne peut pas sortir du langage par le langage. Je n’est jamais moi, le moi n’est jamais celui qui parle, et je peux continuer longtemps ainsi sans, par définition, sortir du langage.
Dans sa première période, Wittgenstein se confronte aux questions logiques plus que philosophiques : comment parler de façon sensée du monde, comment tenir un discours cohérent comme peut l’être un enchainement de propositions mathématiques consistant, irréfutable ?
Page 93. Bascule vers la deuxième période : Plutôt que « forme générale de propositions », tableaux, etc., raisonner par famille de structures. « Une proposition » ne désigne jamais tout à fait la même chose, est toujours circonstanciée.
Malgré son volume, sa souplesse et sa complexité, le langage humain n’est finalement qu’un tout petit nombre de mots, de règles de grammaire, pour embarquer tout un monde de choses et de phénomènes en constant changement. Même en notre ère de standardisation industrielle, aucune pomme n’est similaire à une autre, même pas à elle-même au cours du temps, même seulement le temps qu’on en parle.
Jean-Yves Moyart, Les Arènes, 2021.
Michel Lulek, éditions Repas, 2009.
https://editionsrepas.fr/catalogue/scions-travaillait-autrement
Ce qui fonctionne :
Ce qui pourrait être mieux :
Élisabeth Bost, éditions Repas, 2016.
Très détaillé sur les acrobaties juridiques à opérer pour monter un cadre d’emploi innovant, un type d’entreprise pas comme les autres. Du bricolage, mais au bon sens du terme : de la créativité, de la souplesse, du jeu avec les règles et les usages, quitte à défriser l’administration gardienne des règles et les syndicats pointilleux sur le « droit du travail ».
Très bon texte de Stéphane Veyer sur la loi Hamon de 2014 : soutien ou carcan ?
Alice Rivaz, Zoé, 1947 / 2022
https://www.alice-rivaz.ch/web.php/34/fr/publication/la-paix-des-ruches
https://www.lemonde.fr/archives/article/1998/03/04/alice-rivaz_3656981_1819218.html
Roman sous la forme d’un journal, celui d’une vie domestique et professionnelle, avec les considérations politiques qu’elle peut inspirer. Une vie ordinaire, voire banale (à l’exception, étonnante et non expliquée, du choix de ne pas avoir d’enfants, choix partagé, celui-là et pas beaucoup d’autres, avec le mari), mais éclairer d’une réflexion soutenue sur ce que les menus évènements du quotidien disent des rapports entre les femmes et les hommes. Ce n’est donc pas un traité philosophique ou politique façon Beauvoir, avant tout un relevé de scènes de la vie quotidienne, à la cuisine ou au bureau. La narratrice tresse de beaux portraits de ses collègues dactylographes, de ses quelques rencontres masculines, des descriptions précises et fines de scènes de travail ordinaire, et des envolées sur la relation de genre, l’amour ou l’amitié, la séduction ou le mariage. Exemplaire peut-être de ce que peut être un journal de bord façon « écrit réflexif », pas tant sur le travail (encore que, de belles pages sur le travail domestique) que sur la vie de couple, et alors, avec un côté un peu désuet pour une lecture éloignée de plusieurs décennies, mais avec la force d’un propos ancré dans le vécu, et dans la découverte, chemin faisant, de ce que la réflexivité peut apporter pour supporter le quotidien, assumer des choix de vie.
Chaque fois que Philippe part pour le service militaire, je vois sur son visage le calme joyeux de celui qui va retrouver les siens. Mieux que tous les livres d’histoire, son expression m’explique leurs grands départs en masse depuis la nuit des temps. Tous ces croisés, ces ligueurs, ces combattants de tant de causes, toutes ces interminables files, ces cortèges en marche vers la lutte et vers la mort. Leurs chants, leurs clameurs qui s’élèvent pour un oui, un non, parfois pour moins encore. Leur hâte à répondre à ce mystérieux appel qui les agglutine. Compagnonnage de l’aventure, des plaies, des hymnes, des serments. Ce qui, à chaque génération, les pousse vers quelque incompréhensible carnage. Et à chaque génération les plus intelligents d’entre eux occupés à mettre un nom, des noms, sur le carnage, afin de l’expliquer et de le justifier.
Parfois je me le demande : qu’avons-nous affaire avec de tels fous ?
Oui, l’homme dans l’exercice de ses pouvoirs terrestres, et le voilà qui devient Attila, Néron, Hitler, Napoléon, et dans l’exercice de son autre puissance il se fait clouer sur des croix, arracher la langue, transpercer de flèches devant les Ève et les Marie consternées qui commencent par se tordre les bras, puis s’affairent pour recueillir les membres épars, ramasser, compter les morts, nettoyer la place.
Alice Rivaz, La Paix des ruches, 1947
Paola Pigani, Liana Levi, 2021.
https://www.lianalevi.fr/catalogue/et-ils-dansaient-le-dimanche
À rapprocher de Hans Fallada, Quoi de neuf, petit homme ? : les années 30, le milieu ouvrier, les univers militants vus du (de la) prolo ordinaire, les difficultés d’un couple dans le dur d’un quotidien bouts de ficelle. Mais la comparaison est rude : l’écriture de Pigani est belle, soignée, évocatrice, mais peut-être trop chromo d’époque, un brin raffinée ; « l’embellie » de la mobilisation ouvrière un peu trop convenue, Fallada s’en tenant à des êtres ordinaires, ballotés dans des enjeux politiques décalés de leur quotidien. La chute est un peu plate : « Demain sera un autre jour. »
À l’atelier, Szonja apprend vite à se calquer sur les autres. S’accorder autant que possible au vide entre les machines et les corps des autres. Trouver sa façon d’exister dans l’odeur de l’acide sulfurique. Éviter de les regarder vraiment, les femmes, les hommes tout autour, se concentrer sur les matrices, sur sa tâche, plonger dans le rythme qui cadence ses propres pulsations cardiaques. Tourner avec les machines… Szonja le suit, ce mouvement, avec des gestes déracinés d’elle-même, loin du sang qui bat à la source. D’heure en heure, les gestes s’enchâssent, perdent cette rondeur inutile, leur petite suspension dans le regard si jeune, encore tendre d’ignorance. Le ventre, la poitrine s’aplatissent, les muscles durcissent dans le présent opérationnel, où l’on se fiche bien de son nom hongrois, de son âge, de son sexe. Ils sont si nombreux à venir du même pays, du même village, de la même langue. […]
Szonja fixe des yeux les flottes de viscose, ces écheveaux visqueux ; il lui faut rester attentive à la transformation de la matière souple jusqu’au débit du fil sans fin qu’elle tire avec les mêmes pensées. Elle se crée des rituels, imagine des choses pour oublier la fatigue, y fait un nœud mental à chaque heure écoulée de la matinée. Ensuite, elle oublie, prise dans la coulée des gestes répétitifs. Une mélancolie nouvelle s’étire alors tandis que la pluie s’abat sur la verrière.
[…]
Hier, dans sa chambre, après avoir fermé les volets, elle a placé ses mains sous la lumière chiche qui pend du plafond. Depuis ses débuts à l’usine, elle ne les avait jamais regardées ainsi, à l’intérieur, sauf pour en vérifier la propreté. Ne les avait jamais accolées, ne serait-ce que pour les placer sous le filet d’eau du robinet. Ces mains qui ne connaissaient que l’eau des vaisselles, des lessives, la terre des betteraves, les voici devenus agiles, capables de se placer au bon endroit, de se glisser entre le métal et la fibre artificielle, des mains utiles, des mains uniques. À l’intérieur de leurs paumes, elle ausculte le vide qui lui semble si plein à présent, les lignes devenues des rails et ces doigts, des baguettes dures : elles sont le réceptacle de corps étrangers, d’une matière tiède et changeante, ces mains, devenues passages de rudesse, de flux nerveux et de poison chimiques. Ses mains d’ouvrières.