Giulia Anders, Actes Sud, 2017
De la bonne vulgarisation scientifique, mais qui en dit peut-être plus long sur l’épistémologie de la science moderne qu’un traité savant : la biologiste assume, avec entrain, de raconter la digestion avec force personnages (les sucs, les bactéries, les différents organes) et péripéties (le dialogue des deux sphincters pour l’expulsion de matière fécale, avec Monsieur Cerveau à l’arrière-plan). Chaque acteur a son rôle, chaque organe, microorganisme ou molécule a sa fonction, constituant une trame narrative où pénètre la part de tarte aux fraises, pour en ressortir digérer. On dévoile les astuces (le trou de l’œsophage dans l’estomac un peu décalé), on s’apitoie sur les êtres méconnus ou délaissés (les amygdales, l’appendice) pour leur redonner leurs lettres de noblesse, leur place dans l’histoire.
La métaphore principale me semble rester celle du mécanisme : des emboitements de processus, le traitement algorithmique des aliments, avec quelques ratés nécessitant l’intervention du mécanicien. L’usine cellulaire, mais sans pousser l’anthropomorphisme jusqu’à la culture de l’organisation, son investissement symbolique. Elle aborde, par la bande, la dimension disant psychologique, symbolique de ce qu’on « digère » plus ou moins bien (page 103 : l’inconscient, c’est l’organique sans sensation directe).
Du ravage de la notion de greffe : les organes sont-ils vraiment interchangeables ? Ou encore de l’approche médicamenteuse : on administre un même produit à l’ensemble du corps.
De l’unité corporelle : un seul système digestif, qui définit un individu. Rappel sur le développement embryonnaire (pages 20 et 21) : agencements de trois tubes (système sanguin, nerveux et digestif).
https://www.actes-sud.fr/catalogue/sciences-humaines-et-sociales-sciences/le-charme-discret-de-lintestin