André Comte-Sponville, Vuibert, 2022.
Le mouvement de l’histoire sociale comme celui des pensées philosophiques : il y a bien une progression, parce que chacun lit et se situe par rapport à ses prédécesseurs, mais pour en faire ce que bon lui semble, sans suivre une règle. Idem pour l’art ?
De l’abus de la métaphore : fondements et fondations, profondeur, enfoui ; disponible, visible, en surface, construit ; source de vie, ressources ; techniques, maitrise.
« Mais il faut bien insolent pour s’y tenir. »
« Un œil ne peut se voir lui-même. »
Le temps
Comme le langage : on ne peut pas penser en dehors du temps. « Autant, suspends ton vol ! » Oui, mais combien de temps durera la suspension ? « Je voudrais bien que le temps s’arrête. » ACS : « L’idée d’un arrêt du temps n’est pensable que dans le temps, donc elle ne l’est pas. »
Bel exemple des limites de la substantivation. Encore plus net : « le présent » (c’est-à-dire l’instant présent), par essence, par définition jamais identique !
Projet d’écriture : comme « combien mesure 1 m ? », écrire quelque chose sur « combien de temps dure une minute ? »
Fausse opposition objectif/subjectif. Encore un piège du langage. Ce qui est extérieur à moi (à mon temps ressenti) n’est pas objectif, absolu, c’est le temps ressenti de l’autre (dans sa forme de vie) le temps de la règle, convenu, jamais strictement extérieur.
D’abord une abstraction, comme « le nombre ». Le problème de la définition disparait si on se contente d’évoquer l’évènement (le jour, le lever du soleil, l’éclosion de la fleur, l’ébullition de l’eau).
L’homme
Encore plus que le temps : qui a besoin de définir « l’homme » ? Qui doute sur ce qu’est un homme ?
Dans les pièges du substantif : un homme (singulier) vs un homme (générique). Sans parler de l’homme qui n’est pas une femme.
Sartre : « L’existence précède l’essence. » Qu’est-ce que ça donne avec des verbes ? « On existe avant que d’être » ? « J’existe, puis je suis. » ?
Page 49, citation Marx Engels. « Le langage et la conscience réelle, pratique, existant aussi pour d’autres hommes, existant donc alors seulement pour moi-même aussi. […] La conscience est d’emblée un produit social. » (L’idéologie allemande)
Citations Emmanuel Kant, page 413
La mort
Je crois que tout ce livre va buter sur le choix d’entrer sur des questions philosophiques par un seul mot (plutôt qu’un auteur, une question). Intituler un chapitre « la mort », puis disserter sur « un objet » (première ligne du texte). Comment éviter le piège de la substantivation ? Employer toutes les ressources de la grammaire (ce qu’il fait nécessairement en associant, verbes conjugués, prépositions, adverbes, etc.).
Un animal n’est pas en mesure de distinguer absence et mort d’un congénère (à moins de tuer ?). Est-ce que la peur de la mort est présente dans une lutte entre une proie et un prédateur ?
Poser une définition de « mourir » plutôt que de la mort décale aussitôt le problème !
Métaphysique : ce qui excède toute physique possible.
Le problème n’est pas la mort de soi, mais la mort des autres. Et sans doute est-il partagé avec d’autres animaux ? Au moins pour les espèces avec une certaine sociabilité, un attachement à des congénères, ne serait-ce que la progéniture.
La connaissance
Page 189, citation Alain.
Page 210, Lequier
La liberté
Page 249, Anti Dühring. Incroyable (très étonnant) que j’en sois si éloigné aujourd’hui. Très étonnant aussi cette louange de l’intégration, de la conformité aux prescriptions, aux lois, à la règle à suivre.
Comme pour le chapitre sur « la morale », c’est toujours une approche centrée sur le « je » : c’est l’individu, le sujet qui philosophe, qui raisonne, qui s’imagine jouant de l’anneau de gigues de GS.
Le problème n’est pas le vol, la violence, le mensonge, parfois si utiles, mais leur juste proportion, leur bon usage.
Je me sens de plus en plus loin des lumières, de Kant, Rousseau et de leur apologie de la raison, de l’universel (impératif catégorique, contrat social). J’y lis une négation de la singularité, de la marginalité qui tient la page, des savoirs incorporés, de la renormalisation dans l’activité. Si apprendre, c’est acquérir et entretenir des réflexions, la raison et le concept ne sont que des moyens, et pas des buts en soi.
https://www.vuibert.fr/ouvrage/9782311150087-le-plaisir-de-penser